RDC : devant les juges, Nicolas Kazadi dénonce une « cabale » orchestrée par l’IGF

Désormais disculpé, l’ancien ministre des Finances a été entendu ce lundi comme simple témoin dans l’affaire des surfacturations présumées du projet d’installation de forages dans différentes localités du pays.

L’ancien ministre congolais des Finances, Nicolas Kazadi. © DR
L’ancien ministre congolais des Finances, Nicolas Kazadi. © DR

Publié le 10 décembre 2024Lecture : 3 minutes.

L’ancien ministre congolais des Finances a beau ne plus occuper de fonction officielle, il bénéficie toujours d’un dispositif de protection rapprochée. Ce 9 décembre, ce sont des membres de la Garde républicaine, juchés sur un pick-up, qui ont escorté sa Lincoln Navigator jusque sur le parvis de la Cour de cassation, à Kinshasa. Nicolas Kazadi était ce jour-là entendu comme simple témoin dans le scandale des présumés détournements en lien avec l’installation de forages dans différentes localités du pays. Une affaire qui a précipité sa mise à l’écart du gouvernement, en juin 2024, mais dont il a été mis hors de cause.

Lorsqu’elle éclate, au début de 2024, Nicolas Kazadi compte parmi les premiers cités. Sur la base d’un rapport accablant de l’Inspection générale des finances (IGF), le procureur général près la Cour de cassation lui interdit de quitter le pays, le 27 avril. Le lendemain, il demande à l’Assemblée nationale d’autoriser l’ouverture d’une instruction contre lui et son collègue du Développement rural, François Rubota. L’IGF juge anormal – et suspicieux – le fait qu’un forage d’eau soit facturé 294 605 dollars par Stever Construct Cameroun et Sotrad Water, consortium dirigé par l’homme d’affaires congolais Mike Kasenga. L’État s’était engagé à payer près de 400 millions de dollars pour mille unités de forages.

Mi-octobre, l’ancien ministre a finalement été disculpé. Mais ses deux co-accusés n’ont pas connu le même sort : François Rubota, arrêté puis placé en liberté provisoire, doit encore répondre aux questions des magistrats de la Cour de cassation, tout comme Mike Kasenga, détenu à la prison centrale de Makala. Leur procès s’est ouvert le 4 novembre, à Kinshasa.

« On a voulu faire passer toutes les parties prenantes pour des bandits »

Alors quand, d’entrée de jeu, le juge demande à Nicolas Kazadi s’il y a eu surfacturations, l’ancien ministre renvoie la faute sur l’IGF, qu’il accuse d’avoir monté une « cabale » contre lui « in tempore suspecto, au moment où l’on préparait le gouvernement ». « On a voulu comparer le coût de ces ouvrages avec de petits forages domestiques pour faire passer toutes les parties prenantes pour des bandits en bande organisée ayant décidé de se faire de l’argent, fustige-t-il. N’ayant ni signé ni négocié le contrat, je ne peux donner un avis sur sa surfacturation. »

De fait, le contrat entre le gouvernement et le consortium incriminé a été signé le 23 avril 2021. À l’époque, le gouvernement de Sylvestre Ilunga Ilunkamba, né de l’alliance entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi, est démissionnaire et expédie les affaires courantes. Le ministre du Développement rural s’appelle alors Guy Mikulu, et il a été lui aussi entendu ce lundi comme témoin. À la barre, il a affirmé que les termes du contrat qu’il avait passé n’ont pas été respectés après son départ du gouvernement. Il a également évoqué des décaissements opérés par l’administration qui lui a succédé, quand Nicolas Kazadi et François Rubota étaient aux affaires.

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Y a-t-il eu détournement ? À cette question, Nicolas Kazadi dit avoir eu le « réflexe de toute personne honnête » et affirme qu’il a stoppé les décaissements dès qu’il a constaté une inadéquation entre le montant payé et les travaux effectués. Et de renchérir : « Je me refuse de porter une accusation lourde à la légère, comme on l’a fait contre moi par des services de l’État, qui ont utilisé des rumeurs et des calomnies avec une légèreté incroyable. »

Face à la presse, au sortir de l’audience, Nicolas Kazadi s’est réjoui « d’avoir eu l’occasion de clarifier les choses, de faire voler en éclats tous les mensonges, toute la désinformation, toutes les calomnies qui n’avaient qu’un seul but : avoir la tête du ministre des Finances, qui a été l’un des ministres les plus performants de l’histoire de ce pays ».

Mike Kasenga a pour sa part rejeté la responsabilité des anomalies sur l’État congolais, qui n’aurait pas mis à la disposition de sa société les sites sur lesquels les travaux de forage devaient avoir lieu. « Nous avons le matériel pour terminer le premier lot [200 stations]. Qu’on nous mobilise les sites pour en découdre », a-t-il lancé.

La prochaine audience aura lieu le 23 décembre. Au programme : le réquisitoire du procureur et les plaidoiries de chaque partie.

By Habari

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