ÉCONOMIE

Le projet de reprise de Congo Airways déjà compromis ?

Commandes d’avions en suspens, réunion avortée…. Pour le PDG d’A&M Development, candidat à la reprise de la compagnie congolaise en souffrance, tout ne se passe pas exactement comme prévu. Coulisses.

24 avril 2023 à 18:50

Par Jeune Afrique

Mis à jour le 24 avril 2023 à 18:56

© Facebook Congo Airways

Selon l’accord signé à la présidence congolaise le 2 mars dernier, Khaled Sadek n’a plus que quatre mois pour concrétiser sa proposition de reprise de la compagnie congolaise Congo Airways. Pour cette opération, il avait annoncé être en mesure d’investir 1,3 milliard de dollars. S’il continue à affirmer le « sérieux » de son projet, le directeur général du groupe A&M Development reconnaît faire face à un « énorme problème ».À LIRERDC – Congo Airways : dotation contre rétrocommission, les aveux de Pascal Kasongo Mwema

« La direction actuelle de la compagnie cache toutes les données, les documents, les états financiers et ne coopère pas du tout avec notre équipe », explique le repreneur potentiel. Dans un courrier adressé au directeur général de Congo Airways, avec en copie le président Tshisekedi, le Premier ministre Sama Lukonde Kyenge et les ministres du Portefeuille et des Transports, il explique avoir dû annuler, faute d’accès aux informations relatives à la compagnie, une réunion prévue à Paris le 12 avril. Il s’agissait de discuter de l’acquisition de deux Airbus A320 censés permettre la poursuite de l’activité de la compagnie.

Mobilisation inutile

Un rendez-vous pour lequel les grands moyens étaient prévus à en croire le directeur sécurité d’A&M Development, le consultant Andrew Martorell, également directeur général de Silverback Africa LTD, une entreprise britannique de sécurité privée. Dans un courrier adressé à Khaled Sadek que Jeune Afrique a pu consulter, il déplore la mobilisation inutile d’un dispositif destiné à sécuriser la rencontre : agents de sécurité armés amenés par avion privé, véhicules SUV blindés, équipe d’évacuation médicale… Le tout pour 130 000 livres sterling (près de 147 000 euros), selon lui.

Choix curieux

À en croire le devis qui devait être présenté lors de la réunion, et que Jeune Afrique a pu lire, les appareils convoités n’étaient cependant pas des Airbus A320, mais un avion militaire russe de type Iliouchine II-76 et un Boeing 737-400. « Nous avons d’autres accords en France pour acheter deux autres Airbus 320, ces deux-là sont plutôt destinés à faire du cargo », précise Khaled Sadek.À LIRE[Enquête] Ventes d’armes : les derniers barons du marché africain

« Il n’a jamais été question d’avions Iliouchine », indique une source chez Congo Airways qui précise ne pas « du tout » croire au projet, qui a néanmoins été signé pour laisser sa chance à un investisseur potentiel.

Le devis en lui-même, qui s’élève à plus de 2 millions de dollars par avion pour le premier mois (ce qui inclut un dépôt de garantie), est jugé excessif par les professionnels du financement des compagnies aériennes que nous avons interrogés. Il a été souscrit auprès d’Inter Aero Business, une société plus connue dans le secteur du leasing d’hélicoptères mais qui propose aussi des avions.

Le client désigné n’est pas A&M Development mais Afric’Ompagny SARL, une entreprise mentionnée comme « en cours de création » et dont le siège social devrait se trouver dans le 14e arrondissement de Paris. Son gérant, Rengou Ouzerou Junior, avait lancé en 2016 une chaîne sportive panafricaine, Stad’Afric, aujourd’hui disparue.

Stand-by généralisé

Interrogé par JA, Michel Bidoux, directeur général d’Inter Aero Business, indique avoir été mandaté en exclusivité pour mettre des avions à disposition d’A&M Development et d’Afric’Ompagny SARL. Il a fait plusieurs offres, dont l’Iliouchine et le Boeing 737-400, mais aussi des ATR 42, des Dash 400 et plus récemment, deux A320 susceptibles d’être mis à disposition de la compagnie congolaise dans un délai de quatre mois.

« Il s’agissait de simples propositions, aucun rendez-vous pour les valider n’a été posé », assure-t-il, précisant avoir reçu une réponse négative quant à l’achat de l’avion russe. Immatriculé au Kirghizstan, celui-ci ne serait « pas le bienvenu en RDC ». Les appareils cargo sont destinés au transport de bauxite, croit-il savoir, alors qu’A&M Development compte s’appuyer sur son activité minière pour financer ses projets aériens. Mais avant d’aller plus loin avec son client, l’intermédiaire souhaite disposer d’un document attestant de sa solvabilité.

« Petits soucis »

Avant la poursuite des négociations, le directeur de la sécurité d’A&M Development suggère que la facture de la sécurisation de la réunion avortée soit réglée par Congo Airways. « Nous avons déjà perdu la face avec nos partenaires aériens, pensez-vous que nous puissions nous engager auprès d’Airbus ou d’autres entreprises, alors que les partenaires congolais ne sont pas en mesure de fournir ne serait-ce qu’un document opérationnel ou des états financiers ? » s’interroge Khaled Sadek.

Si Jeune Afrique n’a pu obtenir de réaction officielle sur ce dossier, pas plus au ministère du Portefeuille qu’au ministère des Transports – ce dernier renvoyant vers la présidence -, des sources proches du gouvernement évoquent des « petits soucis à régler » au niveau d’A&M Development, notamment en ce qui concerne la réalité de son chiffre d’affaires. Ces dernières craignent que la signature, à l’initiative de la présidence de la République, ne se soit faite « un peu vite ».

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