Insécurité : Comment la RDC est devenue dépendante des interventions militaires étrangères

Article information
- Author,Armand Mouko Boudombo
- Role,Journaliste- BBC Afrique
- Twitter,@AmoukoB
- Reporting fromDakar
- il y a 3 heures
La république démocratique du Congo connait depuis plus d’un demi-siècle, des conflits sur son territoire, qui ont donné lieu à de nombreuses interventions des armées étrangères, certaines pour appuyer le pouvoir de Kinshasa, d’autres pour le combattre.
Le 19 avril 2024, la Mission de Stabilisation des Nations Unies en République Démocratique du Congo (MONUSCO) a retrocédé la base de Bunyakiri aux Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC).
Le Commandant par intérim de la Force de la MONUSCO, le Général de Division Khar Diouf a qualifié d’instant « historique » le transfert de cette base implantée à Bunyakiri en 2004.
C’est le deuxième camp que la Monusco libère dans le pays, après le retrait, le 28 février, de 2000 de ses hommes qui étaient stationnés à la base de Kamanyola, toujours dans la province orientale du Sud-Kivu.
Suite à leur départ, le camp a été rétrocédé à la police congolaise.
Ces deux premières rétrocessions marquent le début d’une opération qui aboutira, au plus tard le 31 décembre 2024, au départ de tous les 13500 casques bleues des Nations Unies, présents dans le pays, depuis 1999.A lire sur le même sujet
- Insécurité dans l’Est de la RDC : Ce qu’il faut savoir sur « l’Alliance du Fleuve Congo » lancée par Corneille Nangaa18 décembre 2023
- Cinq choses à savoir sur le conflit dans l’est de la République démocratique du Congo21 février 2024
- Pourquoi la crise sécuritaire s’est aggravée dans l’est de la RDC ?3 novembre 2022
Ce départ complet de la composante militaire de la mission onusienne, s’il est effectif comme convenu en novembre dernier entre les autorités congolaises et l’ONU, marquera un tournant important de l’histoire militaire de la République Démocratique du Congo, caractérisée par une quasi permanence de l’assistance militaire étrangère.
Dans cet article, nous vous présentons la majorité des opérations militaires étrangères qui se sont déroulées en RDC, depuis l’indépendance de ce vaste pays, à cheval entre l’Afrique centrale, l’Afrique de l’Est et l’Afrique Australe.
Indépendance de l’armée Congolaise et l’ONUC au secours (1960-1964)
C’est comme l’histoire d’une mauvaise communication qui met le feu aux poudres. Quelques mois avant l’indépendance du pays, le 30 juin 1960, les soldats congolais montrent une certaine fatigue et un certain agacement.
Au sein de l’armée, ils sont 25 mille, dont 1000 officiers et sous-officiers belges et aucun officiers congolais.
Depuis des mois, ils multiplient des gardes et des opérations de maintien de la paix dans le pays, et espèrent changer de grades une fois l’indépendance arrivée, pour certains, atteindre le grade d’officier.
Quatre jours après l’indépendance, la première mutinerie éclate. Nous sommes au grand camp militaire Léopold, aujourd’hui camp Kokolo, à Kinshasa. 500 soldats congolais sont à la manœuvre.
Leur mot d’ordre : « nous voulons, nous aussi, notre indépendance ». Leur leader est aussi tôt dégradé, et mis en prison.
Le général belge Emile Janssens voulant calmer la situation, s’adresse aux soldats, leur disant que leurs missions sont inchangés, écrivant au tableau « Avant l’indépendance = après l’indépendance ».
Un rassemblement de 500 soldats tourne à la manifestation, puis à l’émeute. Ces hommes veulent prendre le contrôle du dépôt d’armes, la police militaire tente de les repousser, mais ils y parviennent quand même.
Le lendemain, les mutins sortent du camp et s’en prennent aux Européens majoritairement belges, qui sont quelques 110 milles au Congo.
Le premier ministre Patrice Lumumba tente de calmer la situation en annonçant un avancement d’un grade pour tout soldat, mais rien y fait. Les dirigeants de l’armée Belge entreprennent une opération de force, et n’en informent Lumumba qu’au bout du processus.

Celui-ci tout furieux révoque le commandant Emile Jansens, le commandant belge, de la force publique congolaise, soupçonnant les belges de préparer un coup d’Etat contre lui.
Prétendant un pont aérien pour évacuer les leurs, les autorités belges font débarquer en RDC, sans concertation avec les autorités congolaises, quelques 10 mille soldats belges supplémentaires, pour porter secours à leurs frères d’armes.
Après des jours de confusion et de suspicions, plusieurs villes vont s’embraser, dans plusieurs parties du pays.
La stratégique et riche province du Katanga finit par faire sécession, ouvrant la porte au maintien de la force belge, alliée au leader provincial, Joseph Tchombe, sur le territoire. La « guerre coloniale » est ouverte.
Le président Kasa-Vubu et le Premier ministre Lumumba, en tournée dans le pays pour y ramener le calme, envoient le 12 juillet 1960, un télégramme à l’ONU.
Ils dénoncent « l’acte d’agression contre notre pays, par l’envoi de troupes belges en violation du traité d’amitié signé entre les deux pays « , et en accusent » le gouvernement belge d’avoir minutieusement préparé la sécession du Katanga « , puis demandent « une aide militaire des Nations-Unies « .
Puis le 14 juillet, ils annoncent au gouvernement belge, par télégramme, la rupture des relations diplomatiques. Le même jour, l’ONU prend la résolution d’intervenir au Congo, et fait débarquer les premiers casques bleues sur le sol congolais deux jours plus tard.
La résolution des Nations Unies exige formellement de la Belgique, le retrait de ses soldats du territoire. Bruxelles tentera de reculer l’échéance le plus tard possible.
On assistera à une mission onusienne composée de 20 mille hommes, qui vont passer 7 ans, sur le territoire congolais, sans véritable mandat d’intervention, dans les affaires internes du pays. La mission cherchera plutôt une solution politique.
Face à la persistance de cette « guerre mondiale », le camp des dirigeants va se fissurer en aout. Le président Kasa-Vubu décide de révoquer le Premier ministre Lumumba, qui lui, lance une procédure de destitution du président.
Le colonel Mobutu Sese Seko aux aguets, fait un coup d’Etat le 14 septembre de la même année. La crise coûte finalement la vie à Patrice Lumumba, le 17 janvier 1961.
Pour l’acteur de la société civile congolaise, Omar Kavota, l’ONUC enregistre un résultat mitigé à cause « des intérêts des grandes puissances dont les intérêts se contredisaient sur le contrôle des richesses du Congo ».
La guerre froide, et l’action de l’URSS (juillet – août 1960).

L’appel aux Nations Unies lancés par Lumumba et Kaza-vubu, le 12 juillet 1960 s’accompagnent par un autre à l’endroit du président soviétique Nikita Khrouchtchev, l’informant que son aide pourrait être sollicitée pour une intervention dans la crise.
Ce premier conflit congolais post indépendance, qui l’oppose à l’ancien colonisateur belge, se déroule en pleine guerre froide, où deux blocs, l’un occidental et l’autre oriental s’opposent par puissances interposées.
Les Etats Unis craignent dans ces circonstances, une intervention militaire du rival soviétique. Le premier ministre Patrice Lumumba est invité à Washington et à New York. A cette époque, les renseignements américains ont décrit la situation au Congo comme une prise de pouvoir communiste classique.
Le Premier ministre congolais, las de ces tentatives diplomatiques vers le bloc occidental, obtient finalement une aide logistique aérienne pour transporter ses troupes et réduire la sécession du Sud-Kasaï, à partir de la mi-août. La région avait elle aussi décidé de faire sécession à la suite de celle du Katanga.
Un don soviétique qui sonna comme un arrêt de mort contre Lumumba.
L’échec de Che Guevara (1965)

Marxiste-léniniste et internationaliste argentin, homme politique d’Amérique latine également, Ernesto Che Guevara, est connu pour être un révolutionnaire. Il participe en 1959, avec Fidel Castro, à renverser le dirigeant cubain Fulgencio Batista.
Le deal tourne court avec son allier, Fidel Castro qui trouve ses prises de position trop libéral et le révoque de son gouvernement, début 1965.
Che Guevara quitte alors Cuba, dont il était devenu citoyen, et prend la direction du Congo, où il débarque en avril de la même année, avec quelques hommes. Son objectif est d’exporter sa révolution, afin de freiner l’impérialisme en terre africaine.
L’aventure ne sera pas fructueuse. Le Che arrive dans un territoire miné par une multitude de groupes armés, dans une guerre motivée par l’exploitation des ressources minières et un affrontement dans lequel américains et Soviétiques se livrent une guerre sans merci.
En plus, les mouvements nationalistes pro Lumumba avec qui il avait l’intention de pactiser ont déjà été décapités et ne contrôlent plus que de petits pans de territoires.
Le Che constatera in fine une désorganisation des hommes armés, une méconnaissance des techniques de guérilla, des rivalités entre les chefs de guerre, et donc, que le Congo n’est pas fait pour la révolution, écrivent ses biographes.
Après 7 mois à tenter de « Cubaniser le Congo », Il quitte le Congo, direction la Bolivie où il rendra l’âme deux ans plus tard.
Les « affreux» pour et contre Mobutu (1961-1967, puis 1996)

Depuis son indépendance en 1960, l’ancien Congo belge est, comme le disent les experts, un laboratoire de nouvelles pratiques. C’est le cas des mercenaires.
Le terme apparait dans l’histoire militaire congolaise, à l’aube de l’indépendance de cette colonie belge.
La riche province du Katanga montre très tôt des véléités de sécession, avant de passer à l’acte. Une décision inacceptable pour l’Etat central, qui lance une offensive pour ramener les recalcitrants, qui sont, cette province riche en minerais, et celle du Bas Congo.
Les autorités mobilisent l’armée nationale, et l’ONU pour la cause. La coalition fera face à une rebellion locale, souvent soutenue par la Belgique, et plus, ce que l’on appellera « les affreux ».
Il s’agit d’un groupe de mercenaires de plusieurs nationalités et races, concentrées sur trois unités, dirigés par trois noms remarquables.
Mike Hoare, ancien militaire britanique, il a pris part à la seconde guerre mondiale, avant d’embrasser une carrière de comptable, avant d’être recruté en 1961 comme mercenaire par le président régional Katangais Moïse Tshombe.
Hoare dirige une unité de mercenaires au Congo, qu’il surnomme « les oies sauvages ».Pour mieux comprendre
- Quelles sont les trois préoccupations exprimées par le Rwanda au sujet de la situation sécuritaire dans l’est de la RDC ?19 février 2024
- Élections en RDC 2023: Insécurité dans l’Est de la RDC, l’équation majeure pour les candidats à la présidentielle du 20 décembre6 décembre 2023
- Le pire endroit au monde pour être un enfant14 octobre 2023
A côté de cette unité, il y a celle de Jean Schramme, alias Black Jack. Capitaine reserviste de l’armée belge. Après son service militaire au Congo en 1954, il entame une carrière d’agriculteur après avoir acheté une plantation dans le même pays, avant d’y être chassé par l’armée congolaise devenue indépendante. Il se refugie au Katanga, et entame son aventure avec Moïse Tshombe en 1961.
Et le plus célèbre certainement des trois chefs mercenaire, Bob Denard. Engagé à 18 ans dans la marine, il grimpe les échelons jusqu’au grade de quartier-maître dans les fusiliers commandos, il est connu pour avoir fait la guerre d’Indochine, et pris part à plusieurs missions secrètes françaises.
Denard prend la direction du Congo en 1961, où il agira comme une main cachée de la France selon l’historien français Walter Bruyère-Ostells.
Les trois chefs ne sont pas des enfants de cœur. Ils sont cités dans plusieurs missions d’espionnage et contre-espionnage, et plusieurs renversements de régimes sur le continent.
Les mercenaires passent sous le contrôle du général Mobutu, alors chef de l’armée Congolaise lorsqu’en juin 1964, Moise Tsombe décide de rejoindre le gouvernement central du président Kasavubu, dont il devient le premier ministre.
L’Armée Nationale Congolaise, ANC, est désormais unifiée, avec l’aide de Denard, qui a réussi à se distinguer de ses deux autres concurrents sur le terrain.

Mobutu au pouvoir après le coup d’Etat de 1965 contre le président Kasavubu, renonce à l’idée de créer une brigade mixte mercenaires-ANC, et compte d’ailleurs se séparer des mercenaires encore appelés « volontaires étrangers ». Ceux-ci se révoltent sous la direction de Bob Denard.
Le 5 juillet 1967, le général Mobutu en personne annonce, dans un message radio diffusé, avoir instauré un état de siège, après que « des commandos étrangers parachutés par deux avions non identifiés ont occupé l’aéroport de Kisangani (ex-Stanleyville). Simultanément, des ressortissants étrangers constitués en milices ont attaqué des unités de l’armée nationale congolaise à Bukavu, capitale de la province du Kivu, où des combats sont en cours ».
Avant que la presse locale n’annonce trois jours plus tard, la fin des hostilités, célébrant « la victoire éclatante de l’armée congolaise sur les forces du mal « . Bob Denard, avec certains de ses éléments blessés au front sont annoncés en Rhodésie (Zimbabwe).
Mais le mercenaire sera une nouvelle fois sollicité au Zaire en 1996, pour tenter de sauver le général Mobutu, de l’avancée de l’AFDL menée par Laurent-Désiré Kabila. Ce sera un nouvel échec des mercenaires.
La Guerre mondiale congolaise Années 1990
L’un des pans les plus marquants de l’histoire des interventions militaires étrangères en RDC, se déroule dans la première moitié de la décennie 1990.
Le Rwanda voisin, vient de vivre la page la plus sombre, en passant par un génocide en 1994, qui a couté la vie à quelques 800 mille personnes de la minorité Tutsi en une centaine de jours.
Les métastases du conflits se font sentir de l’autre côté de la frontière, avec la traversée selon les Nations Unies, de quelques 1,2 millions de Hutus, qui s’installent dans les provinces congolaises du Nord-Kivu et du sud Kivu, où vivent de nombreux Tutsi.
« La plupart des réfugiés sont des Hutu, accompagnés et, dans une certaine mesure, contrôlés par l’ancienne armée gouvernementale, les Forces armées rwandaises (FAR), et par les miliciens Interahamwe qui avaient joué un grand rôle dans le génocide », renseigne le politologue belge Filip Reyntjens.
C’est de cette partie du pays que part une insurrection née en 1996, qui oppose l’Association des Forces Démocratiques de Libération du Congo (AFDL) dirigée par Joseph Désiré Kabila, à l’armée régulière, du président Mobutu Sese Seko.
Le 17 mai 1997, les rebelles de l’AFDL, alors appuyés par le Rwanda et l’Ouganda, réussissent à renverser le régime du président Mobutu, au pouvoir depuis 1965, et installent Laurent Désiré Kabila au pouvoir.
Cette prise de pouvoir par le Mzé, ne va pas calmer les choses entre les anciens alliés dans la lutte pour le renversement de Mobutu.

Une partie de l’AFDL fait défection et forme le mouvement rebelle Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD). Toujours soutenu par le Rwanda l’Ouganda et le Burundi. Les leaders du mouvement accusent Laurent Désiré Kabila entre autres, de n’avoir pas respecté le programme politique sous-tendant un changement de régime à Kinshasa.
Face à cette puissance de feu, le nouvel homme fort de Kinshasa se trouve de nouveaux alliés. Il s’agit de l’Angola, la Namibie, le Tchad et le Zimbabwe, qui lui apportent le soutien en hommes sur le terrain.
Les rebelles réussissent très rapidement à prendre les plus grandes villes de l’Est de la RDC. Le conflit est tellement violent qu’il cause la mort « de plus d’un million de Congolais, déplacé à l’intérieur du pays 1,6 million de personnes et forcé près d’un demi-million de personnes à chercher refuge dans les pays voisins », selon International Crisis Group.
Le conflit mêle à la fois des intérêts ethniques, économiques et même stratégiques. L’Ouganda, le Rwanda et le Burundi présentés comme principaux soutiens des rebelles du RCD affirment que leurs troupes se trouvent en RDC pour protéger leur sécurité nationale, en particulier pour contenir et éliminer les groupes d’insurgés qui utilisent l’Est du Congo comme base pour lancer des attaques contre leurs gouvernements.
Le président Kabila demande à toutes les troupes étrangères de plier bagages et quitter l’Est de son territoire, mais rien n’y fait. La communauté des Etats de l’Afrique Australe (SADC) lance une initiative qui aboutit à l’accord d’un cessez le feu, désigné sous le vocable d’accord de Lusaka.
Les interventions de la SADC (depuis 1998)

Dans l’histoire militaire de la RDC, les épisodes semblent se répéter. C’est le cas des interventions des troupes de la Communauté de Développement des Etats de l’Afrique Australe, SADC.
Le dernier épisode date de moins de trois mois. Nous sommes le 2 février, un hélicoptère Oryx de l’armée Sud-africaine survole les environs de Goma, où le M23 ravive depuis quelques mois les combats.
L’appareil est pris pour cible par des tirs au sol, et endommagé, blessant certains membres d’équipage. L’hélico prenait part à la mission des Nations Unies.
L’incident coïncide avec le récent déploiement d’une mission de la SADC dans la région, notamment près de la ville de Sake, récemment tombée entre les mains de la rébellion.
Avec ce contingent constitué de troupes sud-africaines, tanzaniennes et malawites, c’est le troisième retour de la SADC en RDC en moins de trois décennies.
La première fois c’était en 1998, le regroupement d’Afrique australe invoquait la sécurité collective pour autoriser l’intervention de l’Angola, la Namibie et le Zimbabwe pour combattre une invasion rwandaise et ougandaise qui avait atteint Kinshasa.
A son départ en 2003, la SADC a laissé une force résiduelle pour garantir la défense du pays et créer le secteur de la sécurité de la RDC après la guerre.
Puis en 2013 la SADC a déployé la Brigade d’intervention, constituée de troupes du Malawi, d’Afrique du Sud et de Tanzanie, pour contribuer à contrer la toute première incursion des rebelles M23 dans l’est de la RDC.
De la Monuc à la Monusco (à partir de 1999)

Le règne de Laurent Désiré Kabila ( mai 1997- janvier 2001) n’aura pas été un long fleuve tranquille. L’accord de Lusaka ne met pas définitivement fin aux hostilités qui se poursuivent sur le terrain.
A sa demande, les Nations Unies adoptent une résolution le 30 novembre 1999, qui créée la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC), et lui confie la tâche d’élaborer des plans en vue d’observer le cessez-le-feu de Lusaka signé en juillet 1999 entre la République démocratique du Congo (RDC) et cinq États de la région (Angola, Namibie, Ouganda, Rwanda et Zimbabwe), d’œuvrer au désengagement des forces, et de maintenir la liaison avec toutes les parties à l´accord.
Le mandat de la MONUC va évoluer progressivement, au fur des résolutions du conseil de sécurité, ouvrant d’autres responsabilité pour cette mission onusienne.
On parle notamment de veiller à la sécurité et à la liberté de mouvement de ses personnes, l’organisation doit aussi prêter main forte dans le désarmement, la démobilisation, le rapatriement et la réintégration des groupes armés et surveiller le processus de paix.
Elle hérite aussi de la charge d’inspecter les cargaisons des aéronefs et de tout véhicule de transport utilisant les ports, aéroports, terrains d’aviation, bases militaires et postes frontière au Nord et au Sud Kivu et en Ituri, ce sans prévis, lorsqu’elle estime nécessaire.
Cette mission supplémentaire qui lui est confiée en 2004 s’accompagne par une autre, qui consiste à saisir ou recueillir, les armes et tout matériel connexe dont la présence sur le territoire de la RDC interviendrait en violation de la règlementation.
Lorsque la Monuc change de nom et devient Monusco en 2010, le conseil de sécurité l’autorise à créer une brigade d’intervention. Celle-ci est créée en 2013, un an après l’émergence du mouvement du M23, qui oppose une résistance farouche aux Forces armées congolaises.
Avec ses 1981 hommes (l’effectif a varié selon les résolutions), elle est constituée de 6 unités, dont trois bataillons d’infanterie, une compagnie d’artillerie, une force spéciale et une compagnie de reconnaissance.
L’objectif de cette brigade est de neutraliser les groupes armés et pour objectif de contribuer à réduire la menace que représentent les groupes armés pour l’autorité de l’État et la sécurité des civils dans l’est de la République démocratique du Congo et de préparer le terrain pour les activités de stabilisation, selon la résolution 2098 qui la crée.
«Bien que la brigade d’intervention ait une mission offensive, le fait que l’ONU ne dispose pas de sa propre armée, peut expliquer ce manque de résultat positif de la part de sa mission en RDC » estime Omar Kavota, acteur de la société civile congolaise, qui chapote le Programme de Désarmement , Démobilisation, Relèvement Communautaire et Stabilisation, dans le Nord Kivu.
Le manque de résultats et le début des manifestations des populations contre la Monusco, vont finalement pousser les autorités à demander le départ de la Monusco, du moins, sa composante armée.
La France et l’Opération Artémis (mai-juin 2003)

Mi-mai 2003, alors que la RDC vit encore les moments troubles de ce qui est présenté comme la « première guerre mondiale du Congo », le secrétaire Général des Nations Unies, Koffi Attah Annan lance un appel pour « mettre un terme aux atrocités commises à l’encontre des populations civiles en Ituri ».
La France favorable, fait figure de proue, dans cette opération qui porte le nom de code de « Mamba », qu’elle propose à ses partenaires européens, avant qu’elle ne soit autorisée par le Conseil de sécurité des Nations Unies.
Sa mission, est de « contribuer au rétablissement des conditions de sécurité et à l’amélioration de la situation humanitaire dans la ville de Bunia, capitale de l’Ituri ».
L’opération qui a mobilisé 1500 hommes a été montée, dans le but d’assurer le contrôle de la situation dans l’attente du renforcement du mandat et des effectifs de la Mission de l’Organisation des Nations Unies (MONUC).
Elle est donc brève et ne dure que deux mois et demi, entre le 16 juin, et le 1er septembre 2003.
Selon les experts, les résultats de cette opération ne sont palpables. Il s’entendent à dire qu’elle a été l’occasion pour la France de se repositionner en Afrique centrale et dans la région des Grands Lacs, « dans un contexte où elle s’était progressivement retirée depuis la fin de l’opération Turquoise au Rwanda, le retrait du contingent français de République centrafricaine (RCA) ayant rendu sa présence militaire dans la région quasiment inexistante », analyse Nyagalé Bagayoko, Spécialiste de la réforme des systèmes de sécurité (RSS) en Afrique francophone.
De nouveaux mercenaires en RDC ?
C’est un rapport passé presqu’en sourdine, mais qui inquiète les Nations Unies. Rédigé par un groupe d’experts des Onusiens, il a été rendu public en décembre dernier, et fait état de négociations entre les autorités congolaises et des mercenaires pour un établissement dans l’Est du pays.
Ce sont ces autorités, selon le rapport, qui auraient initié la négociation, entre fin juin et mi-juillet 2023, d’un accord avec Erik Prince, le fondateur de la société de mercenaires Blackwater.
L’homme est déjà cité pour avoir apporté son soutien en hommes et armes au Marechal Khalifa Haftar, l’homme fort de l’Est de la Libye, qui s’oppose au gouvernement central.
L’accord prévoit selon l’ONU, le déploiement dans le Nord Kivu, de 2500 hommes, recrutés en Colombie, au Mexique et en Argentine, avec deux missions : stopper l’avancée du M23 et sécuriser les zones minières.
Pour le moment, le rapport des Nations Unies dit que l’accord a été interrompu, mais disent être au courant de ce que des locaux étaient en construction à près de Sake, pour accueillir les 250 premiers contractants qui devaient, dans un premier temps, arriver fin juillet 2023. Des conteneurs contenant du matériel étaient déjà arrivés sur le site en juillet 2023, toujours selon l’ONU.
Les experts s’inquiètent de ce que le départ de la Monusco qui se précise, et l’allègement de l’embargo sur les armes en RDC, favorisent une prolifération dans la région.
Essai non concluant de l’EAC (2022-2023)

Le 20 juin 2022, un sommet des 7 dirigeants de la communauté des Etats de l’Afrique de l’Est se tient à Nairobi au Kenya.
Au menu des discussions, la situation en RDC, avec la résurgence des attaques du groupe rebelle du M23. La communauté Est-Africaine veut mettre fin aux atrocités, et opte pour le déploiement sur le terrain, de contingents de ces pays respectifs, à l’exception du Rwanda en crise avec la RDC et de la Tanzanie, qui n’a pas souhaité ajouter de troupes sur le terrain.
Des territoires sont attribués à chaque contingents, qui commencent à débarquer sur le territoire en novembre 2022.
Les Ougandais prennent position dans la cité de Kiwanja, dans le village de Mabenga, et le poste frontalier de Bunagana.
Les burundais héritent des hauts plateaux du Sud-Kivu, de la cité de Kitshanga, du village de Kilolirwe et la localité de Sake.
Les Kenyans, stationnent dans les villages de Bwiza, Tongo et Kishishe. Et le contingent Sud-soudanais occupe la base militaire de Rumangabo.
Mais une fois sur le terrain, la mission Est africaine fera long feu. Juste un an, avant que les autorités de Kinshasa ne demandent le retrait.
« cette force n’a pas réussi à résoudre le problème pour lequel elle a été déployée, en particulier en raison de la persistance de l’activité du M23, qui ne respecte pas le processus de pré-cantonnement de ses combattants »,déclarait le porte-parole du gouvernement Patrick Muyaya.
Pour Onesphore Sematumba, chercheur de International Crisis Group pour la région des Grands Lacs, la raison de l’échec est simple, «la force régionale s’est muée en force d’interposition en mettant en place des sortes de zones tampon dont personne ne voulait ».