Manuel Domingos Augusto, ministre angolais: «L’Angola salue vivement la décision de Kabila»

Par Florence Morice
Le président congolais, Joseph Kabila, le 26 janvier 2018, à Kinshasa. REUTERS/Kenny Katombe

L’Angola accueillait hier un mini-sommet régional consacré notamment à la RDC, quelques jours après l’annonce du « retrait » de Joseph Kabila qui a décidé de ne pas briguer un troisième mandat conformément à sa Constitution. Comment ce geste est-il perçu par ses voisins ? Suffit-il à garantir une élection transparente et apaisée en RDC en fin d’année ? Le ministre angolais des Affaires étrangères Manuel Domingos Augusto répond aux questions de Florence Morice.

RFI : Comment l’Angola accueille-t-elle la décision du président Kabila de ne pas se représenter ?

Manuel Domingos Augusto : L’Angola salue vivement la décision du président Joseph Kabila comme une contribution pour l’apaisement de la situation interne. C’est un grand pas, mais ce n’est pas tout pour que le processus électoral puisse aboutir et atteindre les objectifs qui ont été fixés par les Congolais.

Qu’est-ce qui vous inquiète précisément aujourd’hui au sujet du processus électoral en RDC ?

Pour nous, dès que l’accord de la Saint-Sylvestre sera respecté, tout va bien. Il [Kabila] a respecté la Constitution en prenant cette décision. Bien. Il y a d’autres choses qui sont prévues : décrispation, l’inclusivité des élections. Donc d’ici le mois de décembre, il y a plusieurs tâches qui sont prévues dans l’accord. Pour nous, on ne souhaite plus que voir l’accord respecté et que les élections puissent contribuer pour l’accélération du processus de stabilisation en RDC. On n’a pas l’intention de s’immiscer dans les affaires internes de la RDC.

Vous parlez d’« inclusivité » et d’application de l’accord de la Saint-Sylvestre. Cela signifie que vous souhaitez le retour de Moïse Katumbi dans son pays ?

Ce n’est pas à nous en tant qu’Angolais de choisir les acteurs politiques ou les candidats en RDC. Non.

Le retour de Katumbi, c’est ce qui est prévu dans l’accord de la Saint-Silvestre ?

Oui. Mais dans la déclaration de la Saint-Silvestre, il y a au moins plus de 40 tâches qui doivent être accomplies. Il y a aussi l’accès au processus électoral et il y a la loi ou les lois de la RDC. Donc ce n’est pas à nous de faire ce commentaire. Bien sûr qu’on préférerait qu’il n’y ait aucun prétexte qui porte préjudice au processus ou qui porte atteinte à sa crédibilité. C’est aux autorités, pas seulement du gouvernement mais aussi les autorités électorales, d’assurer que le processus sera libre et transparent, et inclusif, je le répète.

Dans votre analyse, le risque d’une élection non-inclusive, c’est celui de la déstabilisation, c’est celui de la violence ?

Le manque d’inclusivité, c’est toujours mauvais. Ce qu’on peut dire, c’est qu’on espère que les autorités congolaises et les acteurs politiques de la RDC vont tout faire pour éviter des sources de perturbations d’un processus normal.

Le président Joseph Kabila était annoncé à ce sommet. Finalement il a été représenté par son ministre des Affaires étrangères, Leonard She Okitundu. Est-ce que vous ne regrettez pas cette absence ?

On aurait préféré que le président Kabila soit là. Quand il est venu à Luanda, lui aussi nous avait dit déjà cette fois-là qu’il allait tout faire pour venir. Et c’est seulement hier qu’on a appris qu’en raison de son agenda, il ne pourrait pas venir. Mais il s’est fait représenter au niveau adéquat. Il y a d’autres chefs d’Etat aussi qui n’ont pas pu venir.

Le président rwandais Paul Kagame, le président ougandais Yoweri Kaguta Museveni.

Donc ce n’est pas à nous de regretter ou pas.

Le Soudan du Sud était également à l’ordre du jour de cette rencontre. Que faut-il, selon vous, pour que cette fois l’accord de partage des pouvoirs entre Salva Kiir et Riek Machar soit durablement appliqué ?

La volonté politique, c’est la première chose. Ils réaffirment qu’ils ont la volonté politique. Bien, mais ils l’ont fait déjà avant. On espère cette fois-ci qu’il y aura peut-être quelque chose de durable parce que c’est incompréhensible ce qui se passe au Sud-Soudan, un jeune pays. Le fait que l’accord a été signé à Khartoum, c’est aussi symbolique. Peut-être c’est une donnée qui va contribuer à la pérennité de l’accord parce qu’on ne peut pas imaginer tout le mouvement qui se passe au Sud-Soudan sans regarder au Soudan. Pour des raisons logiques, il y a une connexion, une interconnexion entre le processus politique qui se déroule dans les deux pays.

Vous voulez dire qu’ils ont leur rôle évidemment à jouer dans le succès ou l’échec de ce processus ?

J’allais dire « un grand rôle ». Les moyens financiers, par exemple les revenus du pétrole, ils sont produits au Sud-Soudan mais ils sont commercialisés à travers le Soudan. Donc, ils sont interconnectés. Et le fait que l’accord a été signé, ma petite expérience me dit que peut-être cela peut devenir un élément rassurant.

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